Noël, fête « empruntée »

par Martyne Perrot
Le Monde, samedi 22 décembre

L'Europe entière sera fascinée par cette privacy victorienne, ses rites, son décor et adoptera ce Noël « revisité ». Un écrivain, Charles Dickens, va jouer dans cette transformation un rôle essentiel. Son livre Christmas Carol, publié en décembre 1843, à mi-chemin entre le conte gothique et la parabole, est avant tout l'exposé de la fameuse « philosophie de Noël », faite de compassion, de charité et de désintérêt matériel. L'ouvrage obtint un succès immédiat et prodigieux, des lectures furent faites à Londres mais aussi à Paris, en 1856 et en 1863, à Boston, en 1866.
C'est à New York qu'un austère professeur d'hébreu, épiscopalien de surcroît, Clement Clark Moore, eut l'idée d'écrire un poème pour ses enfants, « The Night before Christmas ». Publié sans son consentement dans le journal local de l'Etat de New York Sentinel, le 23 décembre 1823, ce poème inaugura une nouvelle imagerie, celle d'un saint Nicolas qui descendait dans les cheminées le 24 décembre et voyageait dans les airs à bord d'un traîneau tiré par huit rennes.
Cette fête, il est vrai, se prête plus qu'aucune autre à l'idéalisation forcenée de « la » tradition. A la fin du XIXe siècle, un journaliste de L'Illustration se plaignait déjà que les Français, à la différence des Allemands, fêtent si mal Noël et soient très ignorants des coutumes.

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Le Monde ToC
Marc Girod
Last modified: Sat Jan 5 21:44:54 EET 2002