« L’histoire est l’art de rappeler aux hommes leur capacité d’agir en société »
Patrick Boucheron
Il y a bien longtemps que les historiens savent
que l’histoire ne s’écrit pas d’elle-même
et que c’est à eux de la faire crépiter
pour que notre temps soit gros des orages du passé,
zébré du feu pâle de ses éclairs.
Machiavel et le tumulte des Ciompi
Prenons un exemple : l’éclair de la révolte.
Lorsqu’il resurgit,
c’est souvent parce que les femmes et les hommes
reprennent confiance dans leur capacité d’agir,
« sans rougir ».
Ainsi parle l’auteur de la Chronique de Charles VI,
croyant dénigrer les soulèvements de la fin du XIVe siècle
dans le royaume de France :
les émeutiers ne ressentent plus ni honte ni crainte de Dieu et,
s’ils se soulèvent,
c’est parce que leur colère est plus forte que leur peur.
Ils font donc, en situation, l’expérience d’un courage
dont ils ne se croyaient pas capables.
« Dépouillez-nous tout nus :
vous nous verrez semblables,
revêtez-nous de leurs habits et eux des nôtres ;
sans aucun doute nous paraîtrons nobles et eux ignobles ;
car seules la pauvreté et les richesses nous rendent inégaux. »
Parole entrée par effraction
« Là où les fautifs sont nombreux, on ne châtie personne ;
là où l’on punit les petits délits,
on récompense les fautes graves. »
Autrement dit, si la violence se généralise,
non seulement elle restera impunie,
mais elle deviendra fondatrice de droit.
« Aussi faut-il, selon moi,
pour que nous soient pardonnées nos anciennes erreurs,
en commettre de nouvelles, en redoublant de méfaits,
en multipliant les incendies et les vols,
et nous efforcer d’avoir en cela de nombreux compagnons. »
Article
Le Monde
Marc Girod
Sat Aug 24 22:12:02 2019