Les échos de la Terreur
Vérités d'un mensonge d'État, 1794-2001
Jean-Clément Martin
Belin, 2018
Partie I Thermidor, le grand dévoilement
Chapitre premier. 1794, la disqualification
La Terreur inoubliable
p. 48
On rejoint ce que Sartre écrivait de l'événement
comme « unité organisée d'une pluralité
d'oppositions qui se dépassent réciproquement »
si bien que l'événement « réagit sur les hommes
et les emprisonne dans son appareil »
et que « c'est l'ambiguïté même
de l'événement qui lui confère souvent
son efficacité historique ».
La disqualification par les faits
p. 51
Le paradoxe tient au fait qu'après avoir joué un grand rôle
dans cette mise au pas,
Robespierre achoppe sur des rivalités avec d'autres députés,
avant d'être accusé d'avoir été le meneur fou
de la Révolution radicale !
La lettre volée
p. 55
Ainsi en faisant porter la responsabilité et le blâme
sur quelques-uns seulement,
tous peuvent accepter la légitimité née de la violence fondatrice.
Tel est l'enjeu de l'invention de la Terreur.
Chapitre II. L'alliance insupportable
p. 58
Il est impossible de considérer la Terreur comme une étiquette
utilisable à volonté ;
son emploi est littéralement performatif, il crée ce qu'il nomme
— et devient l'une des plus grandes mystifications
de notre histoire nationale.
Ce qui s'est passé avant Thermidor n'est ni la Terreur,
ni une pré-Terreur, ni une Terreur masquée,
c'était plus simplement l'enchaînement continu
d'affrontements entre types de gouvernement
et recours à la violence,
débuté dès 1788-1789 et dont le point culminant se situe en 1793.
Centralisation contre Terreur provinciale
p. 75
Rappelons que l'expression « Grande Terreur »
est manifestement devenue courante depuis son usage
par l'historien Georges Lefebvre, dans les années 1930,
comme si elle désignait un acte juridique et politique organisé.
Partie II La Terreur, catastrophe originaire
Chapitre VI. La Terreur, moteur de l'histoire
Des violences complexes, mais ordinaires
p. 184
Alors que pendant des années les nouvelles effrayantes
arrivent de Saint-Domingue où, depuis août 1791,
le soulèvement des esclaves provoque les événements
les plus meurtriers de la période révolutionnaire,
l'historiographie et la philosophie de l'Histoire
n'y accorderont pas d'attention.
Le positif de la négativité
p. 191
Hegel accordait […] à la liberté humaine un rôle essentiel,
sans toutefois résoudre les contradictions quelle provoquait.
Dans cette perspective, la « Terreur » jouait
un rôle central sans être pour autant assignée
à une réalité factuelle contraignante.
Peut-être faudra-t-il féliciter Tallien
pour avoir inventé un monstre tellement indéfinissable
qu'il a pu devenir cet outil universel et polyvalent
permettant la compréhension du devenir humain !
Pour refermer ce livre
Quand la Terreur perd sa majuscule
Terreur et totalitarisme
p. 252
La reconnaissance internationale de l'œuvre de Soljenitsyne
— et en France son passage dans l'émission
Apostrophes en 1975 —
a beaucoup compté dans le changement qui se produit dans l'opinion
à ce propos.
L'écrivain russe devient alors pour une vingtaine d'années,
la référence pour tous ceux qui lisent la Terreur révolutionnaire
comme la préfiguration de la révolution bolchevique.
Les subtilités de la pensée arendtienne,
notamment autour de l'émergence de la liberté
et du pouvoir horizontal qui lui est lié,
avant leur disparition,
signe de la faillite de la révolution elle-même,
ne sont plus de mise devant le récit des exactions populaires
et étatiques justifiées par l'idéologie.
France Culture,
Concordance des temps, Octobre 2018
Histoire
Marc Girod
Sat Dec 7 17:00:22 2019